đ© LEADERSHIP et ĂTHIQUE avec Edgar Morin
On a dit parfois dâEdgar Morin quâil Ă©tait anachronique. Ou au contraire, quâil Ă©tait un prĂ©curseur. On se revendique de plus en plus dâEdgar Morin. Il est dorĂ©navant de bon ton de sây rĂ©fĂ©rer.
« Mâas-tu lu ? » ou « Mâas-tu vu ? »
Pour paraphraser RĂ©gis Debray, nous vivons Ă une Ă©poque oĂč le « Mâas-tu lu ? » a cĂ©dĂ© la place au « Mâas-tu vu ? ».
En cela Edgar Morin ne cÚde en rien à son époque. Dans les médias, il est partout.
Certes, on le voit beaucoup, mais le lit-on ?
Je vous propose un bref exercice dâexploration dâun texte dâEdgar Morin : lâopus 6 de son ouvrage sur la mĂ©thode : LâĂthique.
Lisons quelques extraits pour nous Ă©clairer sur le concept de leadership dans le contexte des crises actuelles. Elles sont nombreuses, elles sâentrecroisent, elles sont pluridisciplinaires : bref elles ont tout pour plaire Ă Edgar Morin.
Crises sanitaires, climatique, politiques, Ă©conomiques. Et partout, une crise de leadership pour faire face Ă tous ces dĂ©fis. Quâest quâune crise ? Pour Edgar Morin, en se rĂ©fĂ©rant Ă la racine grecque du terme, une crise est un processus privilĂ©giĂ© dans un processus dâĂ©volution.
Cela dit, quâest-ce qu'un leader ? Le leader, câest celui qui est le porte-parole, celui qui est Ă la tĂȘte, celui qui jouit dâune autoritĂ© et qui exerce une certaine influence.
Deux interrogations fondamentales sont Ă lâorigine du travail dâEdgar Morin sur la mĂ©thode.
La notion de systĂšme qui renvoie au concept dâorganisation, et celle de rĂ©gulations modulĂ©es par des lois, des hasards, des turbulences.
Tout part du tĂ©tragramme suivant qui constitue en quelque sorte la colonne vertĂ©brale, lâarticulation principale de la MĂ©thode.
Ce tĂ©tragramme distille lâessentiel de la dynamique propre Ă tout systĂšme physique, biologique, social :
Ordre -> DĂ©sordre -> Interaction -> Organisation -> Et retour Ă un nouvel Ă©quilibre
Ce tĂ©tragramme est Ă lâĆuvre partout dans lâunivers. Lâuniversalisme de ce concept tĂ©moigne de son importance. Il est futile de penser quâun individu, quâun groupe, quâun systĂšme puisse se prĂ©lasser trĂšs longtemps dans un Ă©tat stable dâĂ©quilibre.
On peut le souhaiter, mais cela ne se produit jamais. On peut craindre le chaos, le dĂ©sordre, mais ils sont inĂ©luctables. En fait, mĂȘme si cela nous inquiĂšte et nous dĂ©plaĂźt, le dĂ©sordre est en soi nĂ©cessaire. Câest un mĂ©canisme indispensable de rĂ©Ă©quilibrage et dâadaptation.
Le tĂ©tragramme dâEdgar Morin est un mĂ©canisme essentiel que tout leader devrait avoir Ă lâesprit. Mais lâĂ©poque actuelle nâest pas aux vues dâensemble, mais aux vues Ă©troites.
LâĂ©poque dans laquelle nous vivons prĂ©fĂšre la simplification et la surspĂ©cialisation.
Or tous les problĂšmes auxquels nous sommes prĂ©sentement confrontĂ©s nĂ©cessitent (de la part des leaders en premiĂšre instance) une vue globale, de la pluridisciplinaritĂ©. Edgar Morin parle dâune crise comme dâun processus privilĂ©giĂ© dans un processus dâĂ©volution.
En pleine crise, il nous arrive dâĂȘtre confus Ă la fois par lâintensitĂ© des bouleversements et leurs consĂ©quences, et par la panoplie des options qui sâoffrent Ă nous pour retrouver lâĂ©quilibre. En temps de crise, lâintensitĂ© du dĂ©sordre est Ă©gale Ă la quantitĂ© de solutions, de pistes et dâavenues possibles.
Les idĂ©aux sont mis Ă mal, la rationalisation Ă outrance « enferme la rĂ©alitĂ© » alors que rien ne peut lâempĂȘcher de dĂ©border, et le recours Ă la normalisation en vue « dâĂ©liminer LâĂ©trange et lâirrĂ©ductible » est stĂ©rile.
De nos jours, le leader, le bon leader, nâa pas la tĂąche facile. Un bon leader serait celui qui « pense bien ». Pour dĂ©finir ce principe moral, Edgar Morin cite Pascal : « Travailler Ă bien penser, voilĂ le principe de la morale ».
Le leader devrait « travailler à bien penser » :
đ© En dĂ©cloisonnant les connaissances reliĂ©es Ă son domaine dâactivitĂ©s pour favoriser plutĂŽt la transdisciplinaritĂ©.
đ© En cherchant des solutions innovantes aux problĂšmes provoquĂ©s par la crise.
đ© En adoptant une mĂ©thode complexe (complexe ne signifie pas « compliquĂ©e », mais consiste Ă dĂ©couvrir la solution la plus simple et Ă©lĂ©gante possible Ă un problĂšme qui prĂ©sente de multiples facettes).
đ© En faisant preuve dâouverture face à « toutes » les incertitudes et les contradictions que comporte inĂ©vitablement une crise.
đ© En sachant dialoguer et de ce fait, ĂȘtre capable de transcender les idĂ©ologies quelles quâelles soient.
đ© En Ă©tant capable de concevoir lâautonomie des individus ainsi que les notions de morale, dâĂ©thique et de conscience humaine.
đ© En tenant compte Ă la fois du contexte global et des considĂ©rations locales dans nos opĂ©rations.
Il est intĂ©ressant de revenir aux Ă©lĂ©ments fondamentaux de sa mĂ©thode. Jâai toujours Ă©tĂ© en phase avec la pensĂ©e dâEgar Morin.
Référence :
Morin, Edgar. La MĂ©thode. 6 LâĂthique. Seuil, 2004.
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