Changez votre réalité en programmant votre cerveau

La réalité « objective » indépendante existe-t-elle ?

Monture de lunettes transparentes posée sur fond rose, ses verres reflétant une grille 3D néon verte et bleue formant un paysage futuriste.

Qu’est-ce que la réalité (pour vous) ? - par Sylvie Gendreau, le blog Nouveau Leadership (ÉVOLUER) de la Nouvelle École de Créativité

Votre cerveau : un moteur de prédictions

Les neurosciences nous ont démontré que notre perception de la réalité est biaisée. Nous filtrons ce que nous percevons en fonction de nos expériences, de nos souvenirs et nos intentions. 

Notre cerveau pèse un peu plus d’un kilo, mais il consomme 20% de notre énergie quotidienne. Par souci d’économie d’énergie, il est normal qu’il cherche constamment à emprunter des raccourcis. Lorsqu’il visualise un objet, par exemple, il fixe très rapidement son attention sur une image, se contente d’enregistrer un stimuli visuel sommaire et « comble » le reste de la représentation à partir de l’information qu’il a déjà en mémoire. La représentation visuelle est ainsi un processus inconscient de déduction et de remplissage, une approximation de la réalité. 

Plutôt que de traiter chaque détail sensoriel, le cerveau fait tourner en permanence un modèle interne qui anticipe ce qu’il va percevoir. Seuls les « écarts » – les erreurs de prédiction – sont ensuite traités en profondeur. Cette stratégie, dite de predictive coding, permet de fonctionner de manière économe et rapide (NUS Medicine)*.

« Le cerveau compare sans cesse ses attentes aux signaux reçus ; il ajuste ses modèles jusqu’à minimiser les surprises.  »
— Karl Friston (2010)

Étant donné sa plasticité, notre cerveau se transforme constamment selon nos expériences. Certains réseaux neuronaux se renforcent, d’autres s’atrophient par manque de pratique. Ce sont ces réseaux qui sont à la base de notre subjectivité, de nos souvenirs, de notre perception du monde qui nous entoure. 

Construire (et déformer) votre réalité

Puisque c’est notre cerveau qui construit « notre » réalité visuelle, aurions-nous aussi tendance à construire d’autres types de réalité ? L’image jointe est une illustration des différences d’interprétation que peut provoquer une image. S’agit-il d’un oiseau ou d’un lapin ?

Fill-in visuel : face à une image ambiguë (oiseau ou lapin ?), votre cerveau choisit l’interprétation qui cadre le mieux avec votre passé.

  • Biais de confirmation : vous retenez surtout ce qui confirme vos croyances, et négligez le reste.

  • Effet de halo : une première impression (physique, sociale) colore toute l’expérience d’une personne.

Conséquence : nous vivons plus souvent dans la « réalité interne » que dans la réalité objective.

Vers plus de tolérance et d’empathie

Notre cerveau ne se contente pas de construire une réalité visuelle, il fabrique aussi tout un monde d’opinions, d’idées différentes. Le fait de comprendre comment notre cerveau perçoit la réalité devrait nous rendre plus tolérant face à l’opinion d’autrui. Comprendre comment nos expériences façonnent la manière dont nous percevons le monde pourrait nous permettre de converser plus ouvertement avec ceux qui ne partagent pas les mêmes points de vue que les nôtres. 

Finalement, il serait peut-être salutaire de se rappeler que l’on peut être prisonnier de notre propre réalité. Nos penchants, la façon dont nous déformons la réalité, nous empêchent parfois de prendre la pleine mesure d’une situation, exagèrent l’aspect négatif d’un événement et nous voilent les perspectives de solutions.

Diminuons les jugements hâtifs, car nous savons que nous ne voyons qu’une infime partie du réel.

  1. Favorisons l’ouverture d’esprit, en nous rappelant qu’un désaccord peut venir d’expériences et de modèles internes différents.

  2. Améliorons la communication, en posant des questions ouvertes : « Que perçoist-tu ici ? » 

Exercices pour reprogrammer vos perceptions

Challenger vos intuitions

Identifiez une croyance forte (Cette réunion va être ennuyeuse.) et notez trois preuves du contraire : retours positifs, sujets inattendus, etc.

Perspective-switch

Devant une photo ambiguë (par exemple un dessin pouvant être vu “tête en bas”), forcez-vous à l’examiner sous un autre angle : faites pivoter l’image physiquement ou mentalement pour en voir « l’autre sens ».

Micro-routines de pleine conscience

Chaque jour, prenez 2 minutes pour simplement scanner vos sensations corporelles (respiration, contact des pieds au sol). En neutralisant votre flux de pensées, vous entraînez votre cerveau à suspendre ses prédictions automatiques.

En dévoilant les mécanismes de la construction de la réalité, vous gagnez en lucidité et en agilité mentale. Plus vous saurez repérer vos propres filtres, plus vous pourrez choisir consciemment comment interpréter, réagir et communiquer. Bref : programmer activement votre cerveau pour changer votre réalité.


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Références:

Tow Keang Lim, The predictive brain model in diagnostic reasoning, NUS MEDECINE, 2020

Friston, K. (2010). The free-energy principle: a unified brain theory? Nature Reviews Neuroscience. NUS Medicine

Bubic, A., von Cramon, D. Y., & Schubotz, R. I. (2010). Prediction, cognition and the brain. Frontiers in Human Neuroscience. Frontiers

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